Célébration des 10 ans du Concours « Génies en Herbe OHADA » : Mot du Président du CIGHO
J'ai encore en mémoire ces sourires moqueurs, ces regards dubitatifs, ces moues crispées, ces silences tempétueux que l'on a affichés lorsque l'audace nous est venue de penser un concours international sur le droit OHADA. Nulle mauvaise intention ou once de jalousie. Bien au contraire, chacun à sa façon nous prévenait du risque, de la difficulté de la tâche. Pourtant nous n'avions pas affaire à des sceptiques invétérés, des prélats de l'inaction. Bien au contraire, il était question de nous laisser dire par des gens pétris de talents et d'audace que la chose était impossible. Fort heureusement, à ceux-là nous avons su répondre : Relevons ensemble le défi et appelons notre concours « Génies en Herbe OHADA ».
La décision prise, le ton est donné ! Bâton à la main, le combat pour l'excellence du droit est engagé. Dans le huis clos de ”mon palace“ de Treichville et sur ce matelas, fidèle complice, mes compagnons et moi, dessinèrent déjà nos premières stratégies. Nous avions de grandes idées et de grandes ambitions peut-être un peu démesurées à l'époque. Nous n'étions pas parfaits. Cette condition a sans doute justifié les premiers claquements de portes, les demandes de soutien jetées aux mains de nos honorables marchandes de rue qui moyennant une ristourne nous les retournaient, tout sourire, tachées d'huiles. Qu'importe, il fallait tenir.
Pour la première édition, nous avons aimé l'Université, notre Alma mater, avec ses hauts murs et le reliquat de couleurs qu'elle arborait dans le temps. Nous avions une arène et un amphithéâtre qui nous permettait d'accueillir nos légions. Légions ! Enfin, le mot est fort. Pour cette année, Rome, la Providence, ce que vous voulez, nous envoya une décurie. Mais attention, si les candidats étaient peu nombreux, c'étaient des colosses. Grâce à leur vista, leur verve, nous eûmes le droit d'accéder à cette citadelle dont nous avions rêvé, par-delà l'autre rive, fière et digne, solide comme l'ivoire, ce palais des éminences qu'est la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage OHADA (CCJA OHADA). D'ailleurs, avec toute l'humilité qui s'impose, il s'agissait d'une évolution naturelle puisque dès 2009, le Concours était devenu international grâce à la participation de conquérants venus du pays des hommes intègres et des fils de la perle du désert.
Avec cette édition, les premiers mythes sont tombés. Le système éducatif sous régional, dont on pointe souvent les imperfections, s'est montré sous un nouveau jour. En effet, dépassée l'écorce des accents, nous avions découvert ensemble une Afrique passionnée et riche de poètes. Tous conviendront, la recherche d'unité et d'harmonie qui sous-tend le traité OHADA et le droit unifié qui en dérive n'avait jamais eu plus de signification ce jour-là. Dans nos cœurs, dans nos esprits, l'aventure devait vaille que vaille, coûte que coûte, continuer.
Si aujourd'hui j'évoque ces souvenirs, c'est pour mieux remercier celles et ceux qui les ont rendues inoubliables.
A vous mes compagnons de route de la première heure, ceux qui auront supporté le tribut le plus imposant, à vous les pionnières et les pionniers qu'une précédente occasion m'a permis de citer, Merci du fond du cœur. Sans vous tout cela n'aurait été possible.
A ces candidats et plaideurs, à la formule féconde, vous qui avez marqué de votre empreinte le Concours, où que vous soyez, sachez que le CIGHO vous sera toujours reconnaissant.
Dix ans que cela dure et j'en ai vu des générations passer. Certaines sont devenues de respectés magistrats ou de redoutables avocats, d'autres des juristes seniors, des consultants expérimentés ou des enseignants. Avec un peu de vantardise, on peut dire que le concours a révélé des génies de toute nationalité. 10 ans, cela fait du temps et sous d'autres cieux, on pourrait même dire que ça fait deux mandats. J'aurais bien aimé tirer ma révérence, non pas pour des raisons de mandature, mais parce que j'ai beaucoup donné au Concours en sacrifiant d'autres choses non moins importantes.
Il est certainement temps de laisser à une autre génération le plaisir de donner au Concours une dimension autre que celle qu'il connaît aujourd'hui. A partir de cette dixième édition, je ne suis plus le “Project Manager” du Concours. Je laisse à d'autres le plaisir de la fonction en espérant qu'elle procurera à chacun d'eux les mêmes joies, les mêmes rires mais moins de fous stress que ceux qu'elle m'a procurés. Je me contenterai de la qualité de Président du Comité International pour veiller, tel un bonus pater familias, sur ce qui est devenu un patrimoine commun au service du droit et de l'unité de notre continent.
Sur ce dixième paragraphe, Mesdames et Messieurs, chers passionnés du droit OHADA et de l'intégration africaine, je vous dis MERCI !
Vive le Concours International « Génies en Herbe OHADA » !
Dénichez des talents pour en faire des génies !
Pierre Olivier LOBE
Président du CIGHO
Email : olivierlob@yahoo.fr