Forum sur les entreprises publiques en Afrique centrale (FEPAC) : Pour une gouvernance éclairée
Afin de répondre aux enjeux de gouvernance, diverses recommandations se dessinent : renforcer la transparence, adopter un tableau de bord commun de suivi, améliorer la qualité de l'information financière, répondre aux normes, entre autres mesures.
Le Forum sur les entreprises publiques en Afrique centrale (FEPAC), s'est tenu à Brazzaville, du 12 au 14 février 2024, sous la direction du ministère du Budget et des comptes publics de la République du Congo, en collaboration avec la Direction générale du Portefeuille public et la Banque mondiale. Cette initiative avait germé de l'ardent désir de partager les expériences africaines en matière de gouvernance des entreprises publiques.
L'essence même du FEPAC réside dans sa vocation à promouvoir un dialogue panafricain, cherchant à esquisser une feuille de route propice à guider les stratégies nationales, en évaluant la mise en œuvre des mesures décidées. Pour son baptême, le forum a choisi comme thématique la gouvernance, entrave significative à la réalisation des objectifs initiaux des entreprises publiques.
Au cœur des préoccupations résidentielles se dressent plusieurs problématiques afférentes aux entreprises publiques. Les enjeux budgétaires et les risques inhérents, persistant dans le déficit des services publics, engagent la responsabilité de l'État en tant que garant, de manière directe ou implicite. L'octroi souvent inconsidéré de subventions sans corrélation avec des indicateurs de performance tangible éclipse le potentiel incitatif à une meilleure gouvernance.
La qualité des services publics conditionne le développement social, cependant, cet impératif favorise des pratiques quasi budgétaires et l'offre de biens et services non facturés aux organismes publics. Dans un autre registre, le développement du secteur privé bute sur la nécessité vitale d'accès à des services essentiels tels que les télécommunications, l'électricité ou encore le transport.
La lutte contre la corruption reste un défi de taille, où la vulnérabilité à la fraude et à une gestion défaillante des ressources s'entremêle avec des contraintes capacitaires et de contrôle. Dans maints États membres, l'absence de processus structurés pour agréger les données clés sur la performance des entreprises publiques persiste, tandis que la composition et les responsabilités des conseils d'administration demeurent floues.
La qualité de l'information financière des entreprises publiques dans la CEMAC laisse à désirer, marquant une discordance avec les normes de l'OHADA et la rendant inaccessible au grand public. Toutefois, des initiatives significatives ont émané des autorités camerounaises et centrafricaines, visant à améliorer le suivi et la communication des performances des entreprises publiques, notamment à travers l'intégration de rapports agrégés dans les projets de loi de finances et l'émission de décrets détaillant le contenu des rapports globaux.
Un ensemble de règles
Afin de remédier à ces enjeux, diverses recommandations se dessinent : renforcer la gouvernance et la transparence, adopter un tableau de bord commun de suivi, améliorer la qualité de l'information financière, promouvoir le respect des normes de l'OHADA, réaliser un inventaire exhaustif des entreprises publiques, et promouvoir un cadre juridique modernisé pour ces entités.
La gouvernance des entreprises se profile comme un ensemble de règles encadrant leur contrôle et gestion, visant à clarifier les droits et obligations des parties prenantes, à instaurer des procédures décisionnelles transparentes et à améliorer leur performance, rentabilité et transparence.
Le cadre institutionnel actuel des entreprises publiques en Afrique, prédominé par un contrôle étatique, présente plusieurs défis, notamment un cadre législatif inadapté, un processus de création peu clair et des problèmes de performance et de civisme fiscal. Pour y remédier, un nouveau cadre législatif est en élaboration, envisageant notamment une application rigoureuse de l'Acte uniforme OHADA, une redéfinition du rôle de l'État actionnaire et des règles de gouvernance plus strictes.
Les perspectives d'amélioration incluent l'automatisation de la gestion des entreprises publiques, le renforcement des capacités des administrations concernées, l'établissement de plans de basculement vers des sociétés anonymes, la promotion de la transparence financière et la mise en place de plans de formation pour les administrateurs et dirigeants des entreprises publiques.
Au Congo, l'adoption rapide de cette législation novatrice, accompagnée de ses décrets d'application, constitue le pivot essentiel de la réussite de cette réforme. Après l'impulsion du ministère du Budget, il est impératif de mobiliser l'ensemble du gouvernement afin d'établir les fondements juridiques nécessaires pour le développement florissant de l'écosystème contemporain des entreprises publiques.
La Direction générale du portefeuille public devra promptement emboiter le pas pour réaliser la tâche complexe et exigeante de veiller à la mise en conformité des entreprises publiques. Ce sera là un défi de taille, nécessitant une approche méticuleuse pour garantir que ces entités soient administrées avec la transparence, la rigueur et la responsabilité qui les consacreront en tant qu'organisations solides et performantes.
On ne peut que se réjouir de cet engagement pris au plus haut niveau de l'État congolais et lui souhaiter un plein succès dans cette courageuse réforme, essentielle pour le Congo du XXIe siècle.
Source : magazinedelafrique.com
Joël Rault est le président du cabinet de conseil Hermès Advisory et est Senior Advisor chez Franklin, cabinet d'avocats d'affaires indépendant à Paris.