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Arbitrage International / Actualité sur l'obligation de révélation de l'arbitre dans le prolongement de l'Arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 14 octobre 2014

  • 05/06/2015
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Dans le prolongement des Lettres d'information diffusées par votre site (voir les Lettres d'information des 14 et 16 octobre 2014, du 16 janvier 2015, des 9 et 25 mars 2015) au sujet du conflit d'intérêts dans l'arbitrage commercial et d'investissement, nous avons le plaisir de retenir votre attention sur la portée pratique des évolutions récentes autour de l'obligation de révélation à la charge des arbitres, question centrale de l'Etat de droit économique.

L'encadrement juridique de la pratique arbitrale a beaucoup évolué depuis le 14 octobre 2014, date de l'Arrêt de la Cour d'Appel de Paris annulant l'exequatur d'une sentence rendue par l'arbitre unique canadien, Me Henri ALVAREZ, avocat associé du cabinet FASKEN MARTINEAU DUMOULIN LLP en raison de l'existence d'un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre. Il s'agissait d'un arbitrage régit par le centre d'arbitrage AAA ICDR.

Neuf jours seulement (c'est-à-dire le 23 octobre 2014) après cette décision, l'International Bar Association (IBA) a rendu public la version révisée de ses « Lignes directrices sur les conflits d'intérêts dans l'arbitrage international », plus connues sous sa dénomination anglaise des IBA Guidelines on Conflits of Interest in international Arbitration (Version (2014) des IBA Guidelines sur les conflits d'intérêts dans l'arbitrage international).

La publication de ces Guidelines a été suivie par celle de la Convention des Nations Unies sur la transparence dans l'arbitrage entre investisseurs et États fondé sur des traités signée à Port-Louis (Ile-Maurice) le 10 décembre 2014 (Convention des Nations Unies sur la transparence dans l'arbitrage).

Ouverte à la signature le 17 mars 2015 à Port-Louis (Ile Maurice), cette Convention entrera en vigueur six mois à compter de la date de dépôt du troisième instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion.

L'adoption de cette convention est motivée par le fait que la transparence contribue sensiblement à la mise en place d'un cadre juridique harmonisé propice au règlement équitable et efficace des litiges internationaux relatifs aux investissements, renforce la transparence et favorise la bonne gouvernance. Cette Convention s'applique principalement à l'arbitrage d'investissement. La transparence, en arbitrage d'investissement comme en arbitrage commercial, devient le maître mot de la pratique arbitrale. Sera présumé suspect, et traité comme tel, l'arbitre qui ne révèle pas des faits significatifs de nature à susciter un doute raisonnable chez les parties à l'arbitrage.

La solution dégagée par l'Arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 14 octobre 2014 confirme l'obligation de divulgation qui pèse sur les arbitres de toutes les informations de nature à créer un doute raisonnable dans l'esprit des parties à l'arbitrage. Cette obligation de révélation à la charge des arbitres est d'autant plus renforcée qu'elle survit jusqu'à la fin de l'instance arbitrale, c'est-à-dire tout au long de la procédure. A cet effet, l'article 3.b des nouvelles lignes directrices de l'IBA indique que les déclarations de renonciation par lesquelles les parties s'engagent à ne plus remettre en cause l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre après le début de l'arbitrage ne déchargent pas ce dernier de son obligation de révélation continue.

En pratique, toute information ou fait de nature à créer un doute raisonnable dans l'esprit d'une des parties à l'arbitrage doit faire l'objet d'une révélation systématique. En effet, les règles générales 3.d et 3.e des lignes directrices de l'IBA les conflits d'intérêts dans l'arbitrage international précisent que « si l'arbitre a des doutes sur la nécessité de révéler certains faits ou circonstances, celui-ci doit trancher en faveur de la révélation » et ce « sans tenir compte du stade auquel se trouve la procédure arbitrale ».

L'arrêt du 14 octobre 2014 de la Cour d'Appel de Paris rappelle que c'est à l'arbitre de veiller à ce qu'aucun fait ou circonstance, antérieure ou au cours de la procédure arbitrale, ne créé un doute raisonnable dans l'esprit de l'une des parties.

Rappelons que dans l'affaire précitée, il était reproché à l'arbitre unique, qui exerçait comme avocat dans le cabinet canadien FASKEN MARTINEAU DUMOULIN LLP, de s'être abstenu de révéler qu'au cours même de l'arbitrage, alors que l'arbitre unique rédigeait la sentence, son propre cabinet d'avocats avait conseillé et accompagné l'autre partie dans la vente de sa participation dans une exploitation minière, pour un montant de près de 600 millions de dollars, opération présentée par le cabinet comme l'une des plus importantes opération de l'année du cabinet. A l'issue de la découverte de ce conflit d'intérêt non révélé, l'arbitre unique avait démissionné.

Principe essentiel et fondamental de l'arbitrage, l'obligation de révélation à la charge de l'arbitre est devenue la boussole de la crédibilité de la justice arbitrale. C'est ainsi, les règles applicables au conflit d'intérêts insistent sur le caractère déterminant de l'intégrité objective de l'arbitre.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que l'ensemble de la doctrine ait salué de manière unanime la décision et les motivations de l'Arrêt précité du 14 octobre 2014. Il est recommandé aux internautes intéressés par le sujet de consulter le dernier numéro de la Revue de l'arbitrage (2015 p. 151) qui consacre à cet Arrêt de référence un commentaire de 28 pages, sous la signature de Marc Henry, avocat au Barreau de Paris (Hughes Hubbard & Reed) et l'approuve en ces termes : « Aux deux questions la Cour d'appel répond par une confirmation claire des principes arrêtés par la Cour de cassation ».

Formons le vœu que toutes cette évolution majeure concernant la crédibilité du processus arbitral et l'efficacité de la sentence arbitrale inspire dorénavant quotidiennement les praticiens de l'arbitrage et les centres d'arbitrage tant à l'échelle internationale que dans l'espace juridique unifié OHADA.

Joseph Kamga
Email : kamgajoe@gmail.com

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