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Bulletin du bureau de l'administrateur du 12 novembre 2019 de la Banque Mondiale (Groupe Afrique II) consacré à l'OHADA

  • 04/12/2019
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Bulletin du bureau de l'administrateur 12/11/2019
Bulletin du bureau de l'administrateur
12/11/2019

Une large partie est consacrée à l'OHADA au sein du dernier Bulletin du bureau de l'administrateur de la Banque mondiale pour le Groupe Afrique II, paru le 12 novembre dernier.

Une présentation de l'organisation ainsi que son apport dans l'amélioration du climat des affaires figure page 12 ainsi qu'une interview de son Secrétaire Permanent le Professeur Emmanuel Sidibi DARANKOUM est reprise page 19.

Interview du Professeur Emmanuel Sidibi DARANKOUM, Secrétaire Permanent de l'OHADA

Bulletin du Bureau de l'Administrateur (BBA) : Bonjour Professeur. Tout d'abord, toutes nos félicitations pour votre brillante accession, en août 2019, à la tête de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), à la suite d'un processus qui selon nos informations a été très sélectif. Nous vous présentons également tous nos vœux de réussite. Au moment où vous prenez les commandes de l'institution que représente aujourd'hui l'OHADA ?

Pr. Sidibi Emmanuel DARANKOUM
Pr. Sidibi Emmanuel DARANKOUM
Secrétaire Permanent de l'OHADA

Professeur Emmanuel Sidibi DARANKOUM (ESD) : Permettez-moi de vous remercier non seulement pour vos félicitations et vos vœux, mais surtout pour l'occasion que vous m'offrez de faire connaitre davantage l'organisation dont je suis responsable depuis le mois d'août dernier. Car cela fait partie aussi de mon mandat. L'OHADA est une organisation intergouvernementale qui regroupe actuellement 17 pays. Sa mission est de promouvoir l'investissement en garantissant la sécurité juridique et judiciaire des activités économiques, en vue de faire de l'Afrique un pôle de développement. Elle a donc pour objectifs de faciliter les échanges et les investissements et de garantir la sécurité juridique et judiciaire des activités des entreprises des Etats membres. C'est un outil au service de la croissance et du développement dans un marché en plein potentiel qu'est l'Afrique.

Le traité de l'OHADA a été signé le 17 octobre 1993, et révisé le 17 octobre 2008. Ses 17 Etats membres se trouvent géographiquement situés en Afrique Centrale, en Afrique de l'ouest et dans l'Océan indien. Elle représente également une grande diversité linguistique (Français, Anglais, Espagnol et Portugais). L'espace OHADA, constitue actuellement un marché de plus de 225 millions de consommateurs, un PIB de 275 milliards USD, avec un taux de croissance moyen annuel de 4,2% entre 1998 et 2011, et attirant entre 5,19 et 6,38% de PIB d'investissements directs étrangers. L'espace recouvre aussi une main-d'œuvre qualifiée abondante, un potentiel énergétique et technologique, et une attractivité restaurée. La population potentielle de l'espace devrait doubler d'ici 2050 passant de 1.2 à 2.5 milliards d'habitants offrant ainsi de larges perspectives en termes de création de richesses, d'investissement et donc d'affaires.

Les principales activités de l'OHADA couvrent la promotion des actes uniformes, la communication et la dissémination d'informations juridiques et économiques, la sensibilisation et la formation, la documentation, l'organisation des conférences in situ et/ou en visioconférences pour des échanges d'informations et des réflexions, la promotion des interconnexions entre les Etats membres, l'aide pour les équipements de promotion des affaires et des instruments de financements, les audits et la gouvernance, l'amélioration de l'information financière, l'appui aux professionnels de la comptabilité, etc.

De nouvelles adhésions sont en perspectives : le Traité OHADA est « ouvert » à l'adhésion des Etats membres de l'Union Africaine (UA) et même au-delà. Madagascar, Burundi, Cap-Vert, et Sao-Tomé et Principe ont exprimé leur intérêt. Avec l'OHADA l'Afrique se voit ouvrir la voie de l'industrialisation qu'elle devra consolider par des réformes juridiques de pointe.

BBA : En somme un grand espace juridiquement unifié au service de l'éclosion de l'investissement étranger et local. Mais pour que cela se concrétise, vous l'avez dit tout à l'heure, il faut des réformes. Et l'OHADA doit aider à élaborer ces réformes. Quel est le bilan de l'OHADA à cet égard ?

ESD : L'OHADA a contribué à l'élaboration de plusieurs réformes favorables aux entreprises qui ont induit la facilitation des affaires et les créations d'entreprises. Je voudrais citer, entre autres, les actes uniformes relatifs au droit de l'Arbitrage et le règlement d'arbitrage de la CCJA, à la médiation (avec un guide d'utilisation), au droit comptable et à l'information financière (AUDCIF), ainsi que des guides de pratiques professionnelles sur les normes professionnels et le code éthique de la profession comptable, le système d'assurance qualité pour la profession comptable, la diminution du capital social minimum des SARL, et l'élaboration d'un cursus du diplôme d'expertise comptable au sein de l'espace OHADA. 20 | Le Bulletin du Bureau de l'Administrateur

Toutes ces réformes ont eu pour effet d'attirer plusieurs investisseurs vers la zone, encouragés notamment par la mise en place d'une justice non étatique, fiable et rapide, et une information financière conforme aux normes internationales. Il y a aussi la facilitation de l'adhésion aux associations professionnelles des comptables, l'augmentation du nombre de diplômés, l'accès à la formation, l'augmentation du nombre de sociétés créées (plus de cent mille en 2016).

Environ 7% des réformes mises en œuvre en 2017 dans l'espace OHADA sont consécutives à la mise à jour des Actes uniformes et à une large dissémination des dispositifs juridiques innovants qu'ils contiennent. La simplification introduite quant à la création des SARL a permis d'enregistrer chaque année une moyenne de 700 SARL supplémentaires au Sénégal, et plus de 400 par an au Niger. La mobilisation des nouveaux outils entre 2011 et 2015, a permis d'accroître le crédit au secteur privé de USD 1,1 milliards au Sénégal, 894 millions au Burkina Faso, 729 millions au Togo, 607 millions au Mali, 417 millions au Cameroun, 33 millions en RCA et 30 millions aux Comores. Parallèlement, les instruments de financement modernes introduites ont largement contribué à l'émergence de fonds d'investissements au Cameroun et en Côte d'Ivoire.

S'agissant des économies de coûts réalisées par les entreprises, du fait notamment de la simplification des formalités de création, elles représentent entre 0,01 à 0,05% de la formation de capital brute, et sont d'autant plus importantes que le nombre d'entreprises enregistrées est élevé.

A titre principal, quatre textes majeurs de l'OHADA sont pertinents dans l'appréciation de cet indicateur : l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général du 15 décembre 2010 ; l'Acte uniforme du 15 décembre 2010 relatif au droit des sociétés coopératives ; l'Acte uniforme du 30 janvier 2014 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique ; et l'Acte uniforme du 26 janvier 2017 relatif au droit comptable et à l'information financière.

La mise en place du Statut de l'entreprenant, quant à elle, vise à réduire la taille du secteur informel et des économies de survie. Cette réforme nécessite cependant l'accompagnement de chaque Etat à travers une fiscalité incitative et des mesures sociales appropriées. En matière de création d'entreprises sociétaires, l'OHADA a ouvert la possibilité de constituer des sociétés coopératives dans la quasi-totalité des secteurs de la vie économique.

BBA : On voit en effet que l'OHADA a á son actif beaucoup de réalisations. Mais quelles sont les tâches qui vous attendent au moment où vous prenez les rênes de l'organisation ?

ESD : D'abord il faut consolider et maintenir les acquis. Il faudra ensuite rendre effectif le mécanisme de financement autonome dans les 17 Etats membres, légiférer sur les nouvelles matières que sont les transactions électroniques, les franchises, les sous-traitances, les cœntreprises, les contrats de partenariat public-privé, le règlement des conflits de lois et la circulation des actes publics. Il faudra mettre en place les convergences entre le Common law et le Civil Law. Il conviendra aussi d'intéresser le secteur privé à travers une communication ciblée à l'endroit des Chambres de commerce, des Patronats et des investisseurs de l'espace OHADA.

Un autre chantier consistera à contribuer juridiquement à la mise en place de la zone de libre-échange continentale en Afrique, à redynamiser et impliquer les Commissions Nationales OHADA (CNO) pour rendre la base de l'Organisation opérationnelle. Il sera aussi nécessaire de mettre en place l'école numérique aussi bien sur le droit des affaires que sur l'information financière, et instituer un Master en Droit OHADA, tout en mettant en place des cliniques de médiation au sein des centres d'arbitrage et de médiation, et en renforçant les capacités des différents acteurs.

BBA : Vous avez- donc du « pain sur la planche ». Avez-vous à ce stade un message à l'endroit des pays membres ?

ESD : Oui ! et je vous remercie de m'en offrir une plateforme. Je voudrais surtout faire l'écho de l'appel des participants à la réunion de travail tenue à Washington le 19 octobre 2019, sur le thème de « l'impact d'une décennie de réformes visant à améliorer le climat des affaires et les capacités institutionnelles de l'OHADA ». Je me joins à eux pour lancer un vibrant appel aux Etats membres ainsi qu'aux partenaires au développement pour qu'ils intensifient leur soutien à l'organisation afin d'en faire un puissant levier d'amélioration du climat de l'investissement en Afrique et un instrument d'intégration régionale. Je pense que pour ce faire, le Groupe de la Banque mondiale qui appuie déjà l'OHADA dans ses efforts de réforme depuis une décennie, et qui est consciente du rôle catalyseur que l'Organisation pourrait davantage jouer dans la création de marchés et la promotion des investissements privés en Afrique, doit réitérer son engagement à poursuivre son assistance technique et financière à l'OHADA pour en accroître l'efficacité et l'impact économique et social.

En outre, devant la réduction progressive et drastique des contributions des Etats membres aux dépenses de fonctionnement de l'OHADA, je voudrais en appeler au sens élevé de responsabilité de chaque pays pour un versement régulier des cotisations annuelles afin d'éviter de mettre en péril le fonctionnement de l'organisation. Je voudrais toutefois, appeler tous mes collègues à la tête des différentes institutions de l'OHADA à se joindre à moi pour engager la réflexion permettant de trouver dans le moyen terme des mécanismes d'autofinancement qui viendront soulager la charge contributive des Etats membres.

Enfin, nous allons initier des mécanismes pour permettre à l'avenir d'entendre plus et de prendre en compte les voix des Ministres en charge des Finances et des Milieux d'affaires. Nous souhaitons un accompagnement des Etats et des milieux d'affaires à cet égard. Cela permettra d'insuffler un nouveau dynamisme à l'OHADA et d'en faire un véritable outil au service de l'économie.

BBA : Merci Professeur.

ESD : C'est moi qui vous remercie et je saisis l'occasion pour adresser ma reconnaissance profonde aux Chefs d'Etats et de Gouvernements des Etats Membres, aux Pères fondateurs de l'OHADA ainsi qu'à ceux qui m'ont précédé à la tête de l'Organisation pour leur remarquable contribution au développement de l'Afrique et à son intégration juridique et économique progressive.

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