Marché unique européen / Unification du droit des affaires / OHADA et ZLECAf
- 11/02/2024
- 1794
- 2 commentaires
Rappel du Contexte :
Le 24 juin 2023, le Conseil européen a demandé la « présentation d'un rapport indépendant de haut niveau sur l'avenir du marché unique ». En concertation avec la présidence espagnole du Conseil et la Commission européenne, le Premier ministre belge Alexander de Croo a chargé Enrico Letta comme ancien Président du Conseil de rédiger ce rapport. Le Conseil européen a invité la Commission européenne à poursuivre le travail de M. Letta en consultation avec les États membres. Le rapport doit être présenté lors du Sommet de l'Union européenne à Bruxelles en avril 2024.
Analyse :
Dans cet article britannique bienveillant, il apparaît que Monsieur Letta entend mettre en évidence dans son rapport comment le cloisonnement des législations commerciales nationales constitue une entrave au parfait fonctionnement du marché unique européen.
Comme chacun sait, cet espace économique et commercial unifié repose sur les quatre libertés de circulation : personnes, biens, services et capitaux.
Et chacun s'accorde sur le fait que ce marché unique est la grande réalisation du projet européen, de la Commission européenne, sur l'impulsion de son Président, Jacques Delors.
Sans remettre en cause l'apport considérable et historique à la construction européenne du marché unique, Monsieur Letta constate que ce marché repose en effet sur 27 législations commerciales différentes, propres à chacun des États membres.
Ce patchwork de législations commerciales est source de distorsions et d'inefficacité. Il ne permet pas de donner toute son efficience au marché intérieur européen, les start-up et les entreprises de petite et moyenne taille, de taille intermédiaire, n'étant pas en mesure de bénéficier pleinement de ce grand marché au regard des obstacles créés à leur développement et aux échanges par cette mosaïque de règles.
Le « Saint Graal » de la réflexion de M. Letta, dit-il dans son entretien avec Martin Sandbu est de trouver « comment changer d'échelle sans fragiliser les quatre libertés susmentionnées qui définissent le marché unique ». Pour ce faire, il faut notamment renforcer l'intégration et la réglementation commerciale commune.
On peut rappeler que le grand marché américain repose pour sa part sur une seule législation des affaires, l'Uniform Commercial Code, les grands marchés chinois et indien reposant eux-mêmes à l'évidence sur une seule législation.
On comprend de l'article que Monsieur Letta pourrait recommander un 28e régime établissant une législation commune optionnelle des entreprises dans les domaines pour lesquels c'est possible. La Société Européenne Simplifiée, statut souple pour les entreprises de taille intermédiaire, l'équivalent de la société par actions simplifiée, pourrait peut-être constituer une brique essentielle de ce 28e régime.
Dans cet article du Financial Times, journal très lu par les milieux libéraux, une législation européenne commune des entreprises n'apparaît pas comme une couche de réglementation ou d'obligations supplémentaires pour les entreprises mais au contraire comme une opportunité et un espace de liberté pour elles.
C'est donc avec beaucoup d'intérêt que les chefs d'État et de gouvernement attendent les recommandations de Monsieur Letta dans son rapport sur l'avenir du marché unique qui leur sera présenté lors d'un sommet extraordinaire en avril prochain.
Réflexions par rapport à l'OHADA et la ZLECAf :
A l'instar des autres grandes organisations mondiales, l'Union Africaine a engagé résolument une dynamique d'unification commerciale, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) devant aboutir à un marché unique à l'échelle du continent.
Cette initiative bénéficie de la préexistence du système OHADA de droit commercial uniforme à l'échelle d'un espace regroupant déjà 17 pays, représentant près de 300 Millions d'habitants.
Ce droit commun porteur de souveraineté juridique, de protection, d'État de droit économique et de sécurité est connu mondialement et de nombreux États non-membres étudient aujourd'hui avec attention l'intérêt d'un rapprochement avec l'OHADA, voire d'une adhésion à l'Organisation. Cette adhésion leur permettrait en particulier de bénéficier d'une expertise commune dans l'élaboration de leur législation commerciale les protégeant de recommandations d'experts extérieurs au continent, financées par les bailleurs de fonds et parfois inadaptées et inopérantes, comme cela a malheureusement été le cas dans certains pays non-membres de l'OHADA.
Gageons que les recommandations de Monsieur Letta pour la consolidation et l'avenir du marché unique européen renforceront, à partir de l'exemple européen, la conviction de tous ceux qui pensent que la réalisation OHADA, l'acquis OHADA, dus au Juge Kéba Mbaye et aux États membres, constitueront un atout décisif pour le succès du futur marché unique africain envisagé par l'Union africaine dans le cadre de la ZLECAf.
11/02/2024 180647 SALAMA GISITA EMILE
Au moment où certains Etats africains trainent les pas en arrière, l'UE trouve l'OHADA une organisation qui peut revolutionner le droit des affaires à travers le monde entier. Il serait commode que tous les africains adhérent à l'OHADA.